Des recherches récentes révèlent des mécanismes de transmission surprenants des bactéries résistantes entre nos animaux domestiques et les humains, soulignant un défi de santé publique urgent. Ces découvertes s’inscrivent dans un contexte où l’antibiorésistance devient un véritable enjeu, menant à des infections difficiles à traiter.
Définition et impact de l’antibiorésistance dans la santé animale
L’antibiorésistance se définit comme la capacité des bactéries à résister à des antibiotiques qui, auparavant, étaient efficaces pour les combattre. En médecine vétérinaire, cette problématique prend de l’ampleur, surtout face à l’émergence de souches telles que les carbapénémases, qui sont des enzymes produites par certaines bactéries et qui rendent les antibiotiques inutiles.
Les bactéries résistantes constituent non seulement une menace pour la santé animale, mais également pour la santé humaine. Un rapport récent de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) a indiqué une augmentation des infections à Carbapenemase-producing Enterobacterales (CPE) dans les hôpitaux des États-Unis, ce qui peut avoir des répercussions dans les foyers où vivent des animaux.
En effet, les vétérinaires identifient de plus en plus des infections causées par ces souches multi-résistantes dans leurs pratiques. Un échantillon récent a révélé que des cas d’infections par E. coli producteurs de carbapénémase étaient décelés chez des animaux de compagnie, rendant nécessaire une vigilance accrue. Ce phénomène témoigne d’un besoin de changement dans la gestion des antibiotiques et des pratiques vétérinaires.
Les conséquences de l’antibiorésistance
Les conséquences de l’antibiorésistance sont vastes et inquiétantes, tant dans le domaine vétérinaire qu’humain :
- Infections difficiles à traiter : Les infections causées par des souches résistantes nécessitent des interventions médicales plus complexes, qui sont souvent coûteuses.
- Propagation des germes : Les zoonoses, ou maladies transmissibles entre animaux et humains, peuvent être exacerbées par cette résistance.
- Coût économique : Les soins de santé plus longs et plus intensifs augmentent les coûts pour les vétérinaires et les établissements de santé, pesant sur le système de santé.
Cette situation souligne l’importance d’intégrer les pratiques vétérinaires avec les soins de santé humaine, impulsant une approche de « One Health ». Le concept de « One Health » se réfère à l’interconnexion entre la santé humaine, animale et environnementale, prônant une collaboration interdisciplinaire pour aborder les défis de l’antibiorésistance.

Transmission bactérienne : Comment les bactéries passent des animaux aux humains
Le mécanisme par lequel les bactéries passent des animaux domestiques aux humains est complexe. Une étude menée à Worcester County, Massachusetts, a révélé des liens génétiques frappants entre les infections de CPE chez les animaux et les humains. Lors de l’analyse des échantillons, les chercheurs ont découvert que des bactéries résistantes isolées à la fois chez des animaux et des patients humains partageaient des séquences ADN similaires.
Ce type de transmission bactérienne peut se produire de plusieurs manières :
- Contact direct : Les propriétaires d’animaux de compagnie peuvent être exposés à des bactéries résistantes par des contacts réguliers avec leurs animaux, notamment lors des soins quotidiens.
- Environnement contaminé : Les surfaces contaminées dans les établissements vétérinaires ou même à domicile peuvent jouer un rôle crucial dans la transmission.
- Changements dans la microbiote : La présence de bactéries résistantes peut également altérer la microbiote humaine, augmentant le risque d’infections.
Il est essentiel de prendre conscience que cette transmission n’est pas à sens unique. En effet, un animal peut contracter une souche résistante à partir de son propriétaire, ce qui insiste sur l’importance des bonnes pratiques d’hygiène que tout possesseur d’animal doit adopter.
Cas pratiques de recherche et d’épidémiologie
Deux études distinctes ont mis en lumière ce phénomène. Tout d’abord, la première investigation dans un hôpital vétérinaire a observé un groupe d’infections à E. coli chez des animaux. Par la suite, une épidémiologie retrouvée chez des patients humains a révélé des liens avec ces mêmes bactéries. Ces investigations montrent l’importance d’une surveillance accrue dans les établissements vétérinaires.
La collaboration entre experts en santé animale et santé publique est indispensable pour mieux comprendre et prévenir la transmission des bactéries résistantes. Les mesures préventives incluent des protocoles d’hygiène stricts dans les cliniques vétérinaires, ainsi que des campagnes éducatives pour les propriétaires d’animaux. En intégrant une approche interdisciplinaire, il devient possible de réduire drastiquement les risques de propagation.
Les efforts de prévention des infections dans le cadre de la santé publique
La lutte contre l’antibiorésistance nécessite un effort concerté au sein des systèmes de santé publique. La prévention des infections provoquées par des bactérie résistantes passe par plusieurs actions clés :
- Surveillance accrue : Développer des systèmes de surveillance qui permittent d’identifier rapidement les cas d’infection par des bactéries résistantes dans les populations animales et humaines.
- Éducation : Informer les vétérinaires et les propriétaires d’animaux sur les risques de l’antibiorésistance et les meilleures pratiques pour limiter la transmission.
- Collaboration intersectorielle : Unir les efforts entre les autorités sanitaires animales et humaines pour élaborer des protocoles efficaces de gestion et d’intervention.
Ces actions doivent être accompagnées d’efforts pour réduire l’utilisation excessive d’antibiotiques dans les domaines médical et vétérinaire. Une attention particulière doit être portée à l’éducation des vétérinaires sur la nature des CPE, souvent méconnus. Par exemple, une étude a révélé que de nombreux vétérinaires ne reconnaissaient pas les isolats d’infections à CPE, ne pouvant donc pas les diagnostiquer ou les traiter efficacement.

Le rôle des vétérinaires dans la lutte contre l’antibiorésistance
Les vétérinaires jouent un rôle clé dans la gestion de la transmission bactérienne entre animaux et humains. En intégrant des pratiques conscientes de l’antibiorésistance dans leur quotidien, ils contribuent à la réduction des infections. Les vétérinaires doivent exercer leurs connaissances pour diagnostiquer rapidement les infections et prescrire judicieusement des antibiotiques.
Les mesures que les vétérinaires peuvent entreprendre incluent :
- Diagnostic précoce : Utiliser des cultures microbiologiques et des tests de sensibilité pour identifier les bactéries résistantes et adapter le traitement.
- Formation continue : Participer à des programmes éducatifs sur l’antibiorésistance afin de se tenir au courant des dernières avancées dans le domaine.
- Encouragement des pratiques saines : Orienter les propriétaires d’animaux vers des comportements de prévention des infections, tels que la vaccination et un plan d’hygiène familiale.
Des professionnels ont même proposé d’inclure les animaux de compagnie dans les discussions sur les sources potentielles d’infections résistantes. Par exemple, le rapport d’une étude menée dans les Pays-Bas a montré une proximité des bactéries entre les chiens et leurs propriétaires, soulignant la nécessité de traiter ce phénomène comme une question de santé publique.
Le futur dépendra de l’engagement des professionnels de santé à mener ces efforts et à sensibiliser les diverses parties prenantes. Une meilleure formation et une collaboration étroite entre les vétérinaires et les professionnels de santé humaine peuvent grandement contribuer à limiter l’impact de l’antibiorésistance.
Source: www.cidrap.umn.edu